Nous sommes nées à 16 mois d’intervalle. Notre destin était donc scellé par notre ordre de naissance : en tant que grande sœur, elle allait devenir la leader et moi, la suiveuse. Ça s’est révélé assez vrai! Et nos parents se sont naturellement et instinctivement collés aux rôles que la vie nous a donnés. « Prends soin de ta sœur. Aide ta sœur. Amène ta sœur aux toilettes. Aide ta sœur avec ses devoirs » sont des choses que ma grande sœur a entendues souvent !
Aujourd’hui ce n’est plus cela, mais ma grande sœur restera toujours un peu plus responsable et sage et moi, un brin plus désorganisée et délinquante. Je dirais que c’est ce qui fait notre plus grande différence, car pour le reste, nous nous ressemblons sur plusieurs points. Le fait que nos parents aient divorcé alors que nous avions 5 et 6 ans a forcément fait de nous une équipe. Nous nous sommes souvent consolées et épaulées dans l’adversité. Je nous revoie encore, les deux dans l’autobus voyageur entre Québec et Montréal, à l’âge de 7-8 ans pour rendre visite à notre père ou pour retourner vers notre mère. Nous nous sommes confié des secrets. Elle m’a même appris comment « frencher » un garçon à l’aide du creux de mon coude. Essayez, ça marche ! Évidemment, j’avais fait de ses amies les miennes. J’ai donc vécu certaines choses un peu plus tôt que la moyenne, mais toujours sous les yeux protecteurs de ma sœur. C’était donc « safe » (d’autant plus que, lorsque j’ai fait mes pires folies, elle n’était pas là !). Le souvenir que j’ai de notre enfance est certes empreint de chicanes, de lignes imaginaires sur le sofa ou dans la voiture que nous ne devions pas dépasser et de boîtes de céréales qui servaient d’écran pour éviter de nous voir au déjeuner, mais par-dessus tout, de bienveillance, de complicité et de plaisir. L’amour sororal à l’état pur.
Puis, est venu l’âge de jeunes femmes pendant lequel nous avons chacune pris des directions différentes. Isabelle est allée à Québec en communications à l’Université Laval et moi en communications aussi, mais à Montréal, à l’Université Concordia. Pas si différentes après tout : seules la langue et la ville différaient. Quoiqu’elle aspirait à une carrière devant la caméra et moi derrière… Ce qui s’est réalisé pour chacune de nous ! Nous nous voyions moins jusqu’à ce que nous soyons toutes les deux en couple et sans enfants après avoir terminé l’université. Nous sommes ainsi entrées dans la phase « amies/sœurs ». Nos conjoints s’entendaient à merveille et nous aussi. Soupers, voyages, activités de touts sortes ont donc fait partie de notre relation. Nous avions même chacune un chien (Bobo et Brishka) et tous deux ne se lâchaient pas. Et nous nous ressemblions physiquement. À tel point que mon conjoint s’est déjà trompé de fesses alors qu’Isabelle était penchée pour prendre le céleri dans le frigo. Nous avions également les mêmes intérêts : yoga, marche en montagne, cuisine, sorties au chalet, magasinage, lecture.
Puis est venu le temps d’avoir des enfants. Mon Axel et son Eliot sont nés en 2004, suivis de mon Gabriel en 2007 et de son Guillaume en 2008. Les quatre garçons « cousins/amis » sont inséparables. C’est assez magique de voir nos enfants se côtoyer dès leur tout jeune âge, grandir et s’amuser ensemble. Aujourd’hui, on les entend même se confier leurs secrets avant de s’endormir. C’est très précieux.
Comme nous étions en congé de maternité en même temps, il nous est venu l’idée de lancer notre entreprise Glup. Nous allions fabriquer des petits foulards-bavoirs et ramasser des fonds pour venir en aide à des causes qui nous tenaient à cœur. L’entreprise a donc été lancée en 2008, par deux sœurs qui se complètent à merveille. Au début, nous avons fait fabriquer 700 foulards-bavoirs et à ce jour, nous en avons vendu plusieurs milliers. Nous avons également mis sur le marché quatorze autres accessoires.
Isabelle est pleine d’idées, de contacts, de goût et de vision. Son apport sur les plans du marketing et de la marque du produit était indispensable pour faire grandir l’entreprise. De mon côté, je m’occupe de l’organisation, de la production et de la structure organisationnelle. Sans Isabelle, Glup ne serait pas une si belle entreprise aujourd’hui. Elle m’a sorti de ma zone de confort à plusieurs reprises pour me pousser à aller plus loin. Elle m’a permis de ne pas avoir peur d’avancer et de défoncer les portes. Avec les années « glupiennes », Isabelle m’a aidé à avoir confiance en moi, en mes capacités et en la vie. Pour Isabelle, Glup était comme un bébé qu’il fallait faire grandir. Notre bébé !
Il y a quelques mois, aux funérailles du père de son conjoint, elle m’a serré dans ses bras très longtemps… J’ai alors senti très fort le lien spécial qui nous unit. Le lien indestructible malgré les aléas de la vie et malgré les chemins compliqués et différents sur lesquels cette vie nous amène. Le respect, l’humour et la complicité mais surtout l’amour qui nous unit sont aussi forts et précieux qu’indispensables. Le support que nous nous apportons à travers les épreuves que la vie a mises sur nos chemins respectifs est un véritable cadeau. Je sais que ce bagage sera encore plus important pour les années à venir. Et tout cela ne fera que grandir. Je réalise à quel point nous sommes choyées d’être si proches et de pouvoir compter l’une sur l’autre.
Je vous souhaite à vous aussi de trouver quelqu’un dans votre vie pour développer ce lien fort. Une mère, une sœur, une amie, une cousine. Je vous invite à lui rendre hommage et à lui dire toute l’importance qu’elle a dans votre vie. Je vous souhaite que vos enfants, s’ils ont la chance d’avoir de la fratrie, puissent s’épanouir dans cette relation unique et irremplaçable.
Isabelle ma chère sœur adorée, je t’aime et je t’admire. Merci pour tout !